Zahirud-Din Muhammad reçut le surnom de Bâbur, qui voulait dire « le tigre » (Il était très fort, pouvant courir en portant deux hommes sur ses épaules). Descendant de Tlmur par le fils de ce dernier, Mlran Shah, et de Gengls Khan par sa mère, il naquit le 14 février 1483 dans la ville d’Andîjan. Son père, Omar Shelkh Mlrza, souverain de Ferghana, mourut en 1494, et Bâbur hérita du trône, bien qu’âgé seulement de 12 ans. Une tentative de coup d’État par ses oncles échoua, et, une fols son trône assuré, Bâbur pensa à accroître son territoire.
En 1497, il attaqua et prit Samarcande, sur laquelle II pensait avoir un droit héréditaire, mais II dut mater une révolte de l’aristocratie et reconquérir la Ferghana. Une partie de son armée l’abandonna et il perdit finalement Samarcande. Il reprit son royaume perdu, mais en fut de nouveau délogé en 1501 par son ennemi mortel, Shïbani Khan, khan des Ouzbeks. Pendant trois ans, Il tenta en vain de récupérer ses possessions perdues. Puis en 1504, rassemblant quelques troupes fidèles, Il traversa l’HIndu-Kush, prit la ville forte de Kaboul et se retrouva alors à la tête d’un riche royaume. En 1505, il s’allia avec un autre prince timourlde, Husayn Bayqarah, souverain de Herat, contre Shïbani Khan. En 1506, Husayn mourut et Bâbur réussit à hériter de lui. Il passa une année à Herat, mais à cause d’une rébellion iI dut revenir à Kaboul. Deux ans plus tard, un complot de généraux le chassa de Kaboul, mais il réussit à reprendre la ville. En 1510, Shibani Khan fut battu et tué par le shah d’Iran Isma’ll Safavi, et Bâbur décida d’en profiter pour reconquérir les possessions timourides au Mavarannahr. Nommé par le shah gouverneur du Mavarannahr, il dut en revanche reconnaître sa suzeraineté, adopter des coutumes chiites, en conservant toutefois l’indépendance de son domaine de Kaboul. Avec l’assistance de l’armée persane, Bâbur se dirigea vers Boukhara où on l’accueillit comme un souverain légitime, descendant du grand Timur. En octobre 1511, il entra dans Samarcande, dont la population sunnite fut révoltée par son chiisme et ses conseillers persans. En effet, Bâbur perdit très vite sa popularité et, huit mois plus tard, fut chassé (une fois de plus I) de Samarcande par les Ouzbeks.
Il abandonna alors l’espoir de revenir à Samarcande et décida de se tourner vers l’Inde, en particulier vers le Pendjab qu’il considérait comme son héritage légitime par Tamerlan (Timur avait laissé au Pendjab son vassal Khizr Khan, fondateur de la dynastie Sayyid du sultanat de Delhi, détrônée plus tard par un Afghan, Ibrahim Lodî).
Pendant quelques années, Bâbur se consacra à la réforme de son armée, notamment en y intégrant des armes à feu. Cette prévoyance lui donnera un avantage décisif contre les Indiens qui, au début, se moquaient des soldats de Bâbur et de leurs armes bizarres. Il fit plusieurs incursions préliminaires contre le sultanat de Delhi, dont la plus importante fut le siège de Kandahar, qui dura trois ans. En 1521, invité par des nobles afghans révoltés contre Ibrahim, il rassembla 12 000 hommes et quelques pièces d’artillerie, puis marcha sur l’Inde, son armée grossissant au fur et à mesure de son avancée. De son côté, Ibrahim l’attendait avec ses 100 000 soldats et une centaine d’éléphants. Au cours d’une grande bataille qui eut lieu à Pânipat le 21 avril 1526, Ibrahim fut tué et son armée mise en déroute. Le fils de Bâbur, Humayun, prit Agra (où se trouvait la trésorerie du sultanat), et Bâbur en personne s’empara de Delhi. Mais un autre ennemi de taille l’attendait : Rana Sangha de Chit- torgarh, chef de la confédération des Rajputs. Ce dernier savait que l’armée de Bâbur venait de subir des pertes considérables. Il rassembla donc 210 000 hommes. Bien moins nombreuse, l’armée de Bâbur était cependant animée par le fait qu’elle luttait contre des infidèles, des kafir. Bâbur prit même alors le titre de ghazi, guerrier de l’islam, titre adopté par Timur pendant ses batailles en Inde. À Kanwaha, le 10 mars 1527, il remporta une grande victoire sur les Rajputs grâce à la trahison d’une partie de leur armée, tandis que son fils pacifiait la vallée du Gange. Une année plus tard, Rana Sangha mourut, peut-être empoisonné, et les princes rajputs cessèrent toute résistance, Bâbur leur ayant garanti le maintien de leurs possessions et la liberté de conscience. Le 6 mai 1529, lors de la bataille de Ghagra, Bâbur annihila l’armée de Mahmud, frère d’ibrahim. Ce fut la fin de l’opposition en Inde du Nord.
Bâbur passa la fin de sa vie à organiser son nouvel empire, à entraîner l’armée et à embellir Âgrâ, sa nouvelle capitale. Fin lettré, il aimait la musique, composait des poèmes et dicta ses mémoires, le Bâbur Nômâ, chronique de sa vie et de ses proches entre 1494 et 1529, probablement le premier texte autobiographique du monde islamique, écrit en türk djaghataï. Il mourut le 26 décembre 1530 et fut enterré à Kaboul. Humayun lui succéda. La dynastie de Bâbur, connue sous le nom de Grands Moghols, durera jusqu’au xix-siècle et sera détrônée par les Anglais.
Après leurs victoires, les Ouzbeks shïbanikhanides (on les appelle souvent les Abulkhayrides) établirent quelques khanats indépendants : Samarcande, qui était considérée comme la capitale commune mais dont la primauté était purement formelle, Boukhara et Tachkent. Des raids au Khorasan continuèrent jusqu’en 1538, mais la seule acquisition permanente fut Balkh, qui devint un nouveau khanat.
Les Arabshahides du Khwarezm, hostiles aux Abulkhayrides, s’emparèrent de Merv et des tribus turkmènes des steppes de Üst-Yurt, à l’est de la mer Caspienne, ainsi que de Karakoum dans les années 1520. Le khanat des Arabshahides était une confédération d’apanages semi-indépendants de quatre clans, obéissant au khan, dont la capitale était à Vezir, puis plus tard à Ourguentch.
Au Moghulistan, l’émir dughlat de Yarkand, Abu Bekr, avait été battu en 1514 par Sultan Sa’id Khan, frère cadet du khan djaghataïde de Tourfan, lequel avait trouvé un soutien auprès de la cour de Bâbur. Abu Bêler fut chassé de Kachgar et Yarkand jusqu’au Ladakh, et le sultan Sa’id établit son État en Kachgarie, après avoir reconnu formellement la suzeraineté de son frère à Tourfan. Sur ces entrefaites, les Djaghataïdes disputèrent les terres au nord du bassin du Tarim aux tribus türkes des Kirghiz.
Sous le règne de Qasim, le khanat des Kazakhs atteignît à l’ouest le fleuve Yaïq (Oural) et même la Volga, prenant une partie du domaine les Mangïts. Mais en 1521, après (ou juste avant) la mort du khan, les Kazakhs furent battus et les Mangïts devinrent à leur tour les maîtres de Dasht-i-Qïpchaq.
Peu de temps après, une guerre éclata entre les khanats abulkhay- rides. Vers 1583, Abdallah, khan de Balkh, détruisit les trois autres khanats (Boukhara, Samarcande et Tachkent) et se proclama khan suprême des Ouzbeks, fixant sa capitale à Boukhara. En 1584, il conquit le Badakhshan ; en 1588 Herat ; en 1593-1596 il prit le contrôle du Khwa- rezm, dont le khan dut s’enfuir en Iran. Durant ses campagnes victorieuses en Iran (1591-1598), trois khans djôtchides, venus de Haji-Tarkhan (Astrakhan) après la destruction de ce khanat par le tsar Ivan le Terrible en 1556, jouèrent un rôle non négligeable et prêtèrent allégeance à Abdallah.
En 1598, Abdallah mourut après une défaite face à l’armée kazakhe. Son fils commença par assassiner tous ses oncles et cousins, mais lui-même trouva vite la mort à son tour, tué par ses propres émirs. Vers 1599, une nouvelle dynastie arriva au pouvoir, les Ashtarkhanides (ou Janides). Toutes les conquêtes extérieures d’Abdallah furent perdues ; et en 1598, les Arabshahides, aidés par les Perses, retournèrent au Khwarezm. Les Janides divisèrent le pays en deux khanats, Boukhara et Balkh, gouvernés par deux frères. Pendant tout le xvir siècle, les khanats des Janides et des Arabshahides menèrent des guerres entre eux, la fortune changeant souvent de camp. Mais ils se battirent aussi avec leurs voisins, en particulier les tribus turkmènes, l’Iran et les Moghols. Les deux khanats s’affaiblirent au cours du xvii siècle, et finalement, en 1657, les Janides perdirent le Badakhshan.